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La logistique verte, l’avenir de la supply chain

    Slow logistiquelogistique vertegreen supply chain, green logistics… ces expressions ont envahi depuis peu les publications orientées vers les métiers de la logistique et du transport. Il faut dire que la crise sanitaire actuelle a réveillé les consciences écologiques d’une partie de la population. Il s’agit bien là du seul aspect positif de cette pandémie. 

    En révélant la fragilité de nos organisations et le lien entre activité humaine, écologie et circulation des virus, la crise de la Covid-19 nous pousse à envisager nos process de production, de stockage et d’acheminement de manière plus durable. Sans oublier l’impact de la numérisation qui est à la fois positif et négatif. Que de challenges à relever !

    Pour une logistique durable sur le plan économique et écologique

    L’intérêt du secteur pour les solutions durables n’est pas nouveau. En effet, créé en 2011 en parallèle de la SITL, le salon ECO transport & logistics mettait en avant, il y a 10 ans déjà, les technologies vertes applicables à la logistique et au transport. Les problématiques explorées semblent étonnamment d’actualité :

    • Comment réduire la pollution engendrée par le transport routier, tout en conservant la flexibilité inhérente à ce mode ?
    • Quelles solutions adopter pour rendre l’entrepôt plus autonome en énergie et moins polluant ?
    • Comment optimiser l’entreposage ? la livraison du dernier kilomètre ? 
    • Quelle seconde vie pour les déchets d’emballage ?
    • Comment calculer le coût carbone ?
    • Peut-on concilier écologie et compétitivité ?

    Nous nous posons aujourd’hui les mêmes questions, avec cependant davantage d’éléments de réponse et dix années de recherche et d’innovations à disposition. 

    L’objectif reste le même : trouver le point d’équilibre entre la performance de la supply chain et la réduction de son impact sur l’environnement. Certaines réponses sont plus timides que d’autres : panneaux photovoltaïques et recyclage des emballages semblent suffisants pour certains, quand d’autres militent pour une refonte totale du système. Entre les deux, chez ACCELIIS et VERSA nous sommes assez fans de la slow logistique inventée par Fabien Jouvet (Président de Skipper). Nous aurons l’occasion d’y revenir.

    Les axes d’amélioration de la logistique

    Il existe aujourd’hui des solutions bien connues et de plus en plus répandues pour verdir notre activité. Sans aller vers une liste exhaustive, nous pouvons évoquer quelques pistes de réflexion et les solutions disponibles.

    La conception des entrepôts logistiques

    Nous sommes ici dans le royaume du tangible avec deux cas de figure : l’amélioration de l’existant ou la construction d’une nouvelle structure. Encore une fois, rien d’exhaustif, mais il est possible d’atténuer l’impact environnemental de notre activité en se focalisant sur les points suivants :

    • L’objectif zéro artificialisation nette des sols doit nous faire préférer la réhabilitation de l’existant à la construction sur des sols encore vierges.
    • L’orientation des bâtiments doit permettre de faire entrer naturellement la lumière, de réguler la température.
    • Le choix des matériaux de construction a bien entendu un impact important, à la fois au moment de la production de ces matériaux mais aussi après leur implantation.
    • L’alimentation en énergie des entrepôts peut tendre vers plus d’autonomie, couplée à des équipements moins énergivores. Panneaux photovoltaïques et éclairage basse consommation feront ainsi bon ménage, pour prendre un exemple évident. 
    • La captation et le traitement des eaux a aussi son importance et peut être facilement mise en place.
    • La localisation de l’entrepôt doit favoriser le report modal. Les accès au réseau ferroviaire ou fluvial offrent de belles perspectives.

    L’organisation de la chaîne logistique

    • La gestion optimisée de l’entrepôt évite notamment les déplacements inutiles de marchandises. Les stratégies collaboratives sont d’ailleurs une piste de développement durable à envisager. Plus d’infos sur la supply-chain, logistique et stratégies collaboratives.
    • Le choix et le recyclage des emballages a un impact considérable. Il permet de limiter au maximum le recours à des matières premières polluantes et difficiles à recycler. 

    Les problématiques d’avenir

    La livraison du dernier kilomètre (last mile delivery) est l’une des problématiques majeures de ces dernières années. D’autant plus depuis l’explosion du e-commerce dûe aux confinements et autres couvre-feu, qui s’accompagnent d’une augmentation significative du nombre de colis à livrer aux particuliers ou en points relais. La pollution des villes et la saturation du trafic routier n’a pas attendu cette accélération de l’activité e-commerce. Livraison en vélo-cargo, en véhicules électriques ou par drone doivent s’accompagner d’une réflexion globale sur la logistique urbaine. La startup Welco propose à ce titre un concept intéressant, qui recrée du lien social en plus de faciliter la distribution et la récupération des colis : la première solution de récupération de colis entre voisins.  

    Du multimodal au report modal : au-delà de la subtilité sémantique

    Il y aurait beaucoup à dire sur le rapport entre transport et écologie. En particulier sous l’éclairage de la perception du grand public, souvent bien loin de se rendre compte des avancées déjà réalisées par la filière. 

    Nous le savons, le CILOG a annoncé des mesures concrètes pour relancer la filière logistique française. Nombre de ces mesures concernent aussi le transport, avec notamment la volonté affichée d’aller vers un report modal.

    Un petit éclairage sémantique s’impose ici :

    • Le transport multimodal, nous le connaissons bien. Il nous permet d’aller chercher le meilleur transit time au prix le plus abordable. Mais l’impact carbone du transport ne fait partie des critères de comparaison. 
    • Le report modal ne change en rien cette recherche du mode de transport optimal pour un produit donné. Mais il désigne le report d’une partie des flux d’un mode de transport (en particulier routier) vers d’autres (ferroviaire et fluvial surtout).

    Envisager aujourd’hui le report modal nécessite de s’attaquer à plusieurs problèmes, parmi lesquels  :

    • Les infrastructures ferroviaires et fluviales ne sont aujourd’hui pas à la hauteur.
    • Les flottes de bateaux et de trains de transport de marchandises sont vieillissantes et ne correspondent pas aux attentes.
    • Mettre au rebut des véhicules roulants au profit d’autres modes de transports n’est pas très écologique.
    • La localisation des entrepôts logistiques existants n’est pas optimale pour un report modal.
    • Le personnel qualifié et les formations adaptées manquent.

    Un plan d’action a été présenté, et avec lui des enveloppes importantes pour aider le secteur dans sa transition. Le triptyque avion, bateau, camion ne doit plus être le modèle dominant, car bien trop polluant. Mais tout n’est pas aussi simple car on ne peut pas se passer si facilement du transport routier et maritime.

    Face à ce problème, les acteurs de ces modes innovent pour développer des flottes plus vertes. 

    Pour le transport routier, moteurs électriques, hydrogène, biocarburants sont des alternatives sérieuses. Couplées à l’optimisation des itinéraires, à l’éco-conduite et à la logistique inversée, elles permettent de diminuer significativement le coût carbone. Reste la question de l’acceptation de temps de transports plus longs, pour une utilisation plus raisonnée des volumes.

    Le transport maritime est dans une période difficile, nous le savons bien. Mais au-delà du prix du conteneur, qui pousse à reconsidérer d’autres voies d’acheminement et un sourcing plus proche de nous, c’est aussi la question du coût carbone de l’acheminement par la mer qui est en question. Car ce mode de transport est aujourd’hui responsable de l’émission de 10% des gaz à effet de serre. Dès 2023, nous devrions voir en mer des porte-conteneurs zéro-émission conçus par Maersk. De quoi ouvrir la voie à d’autres initiatives.

    Au-delà du transport lui-même, c’est aussi l’impact de ce que l’on transporte qui est important. Et celui qui est en bout de chaîne n’est pas nécessairement à pointer du doigt.

    La transition numérique n’est pas si verte que ça

    Le magazine Chut!, qui “interroge l’impact des technologies dans nos vies”, a consacré son quatrième numéro à l’Odyssée écologique. En explorant ce paradoxe : si le numérique va nous permettre d’opérer la transition écologique, il est cependant une partie du problème et son impact sur la planète va devenir de plus en plus important. Sans oublier que les ressources indispensables à la conception des devices et au stockage des données ne sont pas inépuisables. Évolution des pratiques et de la conception des produits sont à amorcer dès aujourd’hui.

    Comment pouvons-nous faire pour que la logistique 4.0 soit compatible avec une supply chain durable ? Il apparaît clairement que la performance a aujourd’hui beaucoup à voir avec la collecte, l’analyse et le partage des données. Surtout lorsque les différents acteurs de la chaîne sont dispersés à travers le globe. 

    Il ne s’agit pas de s’en passer. Mais nous pouvons minimiser l’impact du numérique dans nos organisations à travers :

    • Le choix du matériel informatique (ordinateurs, tablettes industrielles et smartphones de nos collaborateurs). L’indice de réparabilité des appareils est un excellent indicateur de leur durée de vie. Il est également intéressant de s’orienter vers les marques qui sont soucieuses de l’impact de leur activité.
    • La sélection de nos prestataires IT est également stratégique. Il n’est pas toujours évident de savoir dans quel data center seront hébergées vos données, ou s’il fonctionne en partie grâce à des énergies renouvelables. Mais nous devons nous habituer à poser la question. De même, est-ce que les systèmes développés par votre prestataire pourront évoluer avec votre activité ou sont-ils fermés ? 
    • Le refus de la gadgetisation numérique au profit de technologies à réelle valeur ajoutée est important. Invisible ne veut pas dire innocent…

    Et la traçabilité dans tout ça ?

    Nous le savons, la traçabilité permet de mieux suivre le produit, du sourcing à la livraison en passant par les différentes étapes de sa transformation. Si ce n’est pas sa fonction première, la traçabilité nous aide à évaluer l’impact écologique d’un article.

    Les systèmes de traçabilités peuvent être peu gourmands en énergie, notamment via ce grand classique qu’est le code barre ou des technologies plus récentes comme les beacons fonctionnant avec le BLE (bluetooth low energy). L’avantage du code barre est cependant de ne pas nécessairement générer de déchets : on peut très bien se passer d’étiquette en gravant directement le carton ou s’imprimer sur un tissu par exemple. 

    De superbes outils de mesures sont à la disposition des professionnels de la logistique et des industriels. Citons par exemple la startup française Searoutes, qui aide ses clients à mesurer l’impact d’un transport maritime en termes de CO² et à opter pour la voie optimale. Pour le transport routier ou aérien, d’autres outils existent. 

    Nous avons déjà abordé la question de la blockchain en logistique dans le blog d’ACCELIIS. Cette forme ultime de traçabilité de bout en bout de la chaîne devient un argument marketing majeur. En effet, en donnant accès à la blockchain au consommateur, des marques bien connues de l’industrie textile telles que Veja ou Tex jouent la carte de la transparence et permettent au consommateur d’évaluer si la conception et l’acheminement du produit correspondent à ses attentes. 

    Le coût de la transition

    Nous l’avons bien compris : on ne peut plus se contenter de limiter les dégâts. Les enjeux sont bien trop importants. Mais pour autant, cette transition a un prix, ce qui inquiète légitimement les entreprises.

    D’un point de vue économique, nombreuses sont les solutions qui permettent d’optimiser les coûts de fonctionnement. De quoi amortir rapidement leur déploiement, d’autant plus qu’elles ne nuisent en rien à la compétitivité. Mais cela ne permet pas forcément de tout compenser. La filière transport est d’ailleurs peut-être davantage impactée par ces coûts, parfois très importants. Trop peut-être pour que les TPE/PME puissent les envisager.

    Qu’en sera-t-il alors de ces entreprises le jour où posséder une flotte verte sera une obligation ? Pourront-elles vraiment se le permettre sans aides à l’investissement ? Une politique européenne, et pas seulement nationale, est indispensable pour accompagner cette transition et éviter une délocalisation vers des pays moins regardants sur l’impact écologique de la supply chain.

    Enfin, une double question se pose : est-ce que ce coût va être reporté sur le prix des produits acheminés et est-ce que le consommateur est prêt à mettre la main au portefeuille à l’heure où la livraison gratuite devient la norme ?

    La conscience écologique du consommateur doit englober la supply chain

    Les attentes du consommateur, de plus en plus acteur de son environnement, évoluent. Les marchés cherchent donc à s’aligner avec ces attentes. Logique en effet.

    Cependant, la question de l’acheminement n’est pas aussi centrale dans la décision d’achat que l’origine des matières par exemple. Alors que son impact est tout aussi important. Le consommateur est sensible au bio, à l’éthique, à la gestion raisonnée des ressources. Ces questions, notamment celles d’un sourcing éthique, sont largement relayées par la communication des marques depuis des années. Et ce phénomène s’intensifie. Quitte à verser dans le greenbashing, mais il s’agit là d’un autre sujet.

    Concernant l’impact de la supply chain, le consommateur a encore besoin d’être informé, sensibilisé. Car nous sommes là en plein paradoxe : je recherche une paire de baskets éco-conçus, avec un caoutchouc naturel récolté par des producteurs rémunérés au juste prix, et un cuir végétal. Mais je veux mon article chez moi en 48 heures, sans payer de frais de port.

    Aujourd’hui les choix du consommateur impactent donc surtout la production et le sourcing. Mais pas tellement la supply chain. De quoi ruiner les efforts des deux fonctions pré-citées…


    La crise sanitaire, en entraînant des ruptures, a mis la supply chain en avant. Les consciences évoluent et la logistique verte commence à faire parler d’elle. Il nous appartient de faire en sorte que cela s’amplifie.

    Retrouvez également cet article sur le blog d’ACCELIIS